Le médecin-conseil de recours, appelé pour apporter son analyse ou ses conseils lors d’un litige ou d’une expertise, est soumis aux obligations déontologiques de sa profession notamment aux dispositions des articles R. 4127-28 et R. 4127-56 du code de la santé publique.
Les ayants droit d’une personne décédée ont demandé à M. B., médecin généraliste, de rédiger une note technique mettant en cause la qualité des soins prodigués à la défunte avant son décès par M. C., également médecin généraliste. Celui-ci a alors porté plainte contre M. B. devant la chambre disciplinaire de première instance de Midi-Pyrénées de l'ordre des médecins. Cette dernière a infligé à M. B. la sanction d’interdiction d'exercer la médecine pendant six mois dont trois mois assortis du sursis. M. B. a interjeté appel.
Dans une décision du 2 novembre 2016, la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a rejeté l’appel formé par M. B. Elle a tout d’abord affirmé que celui-ci, même en qualité de médecin-conseil de recours, était soumis aux obligations déontologiques posées par les articles R. 4127-28 et R. 4127-56 du code de la santé publique. Elle a ensuite souligné que la note technique rédigée par M. B. concluait de façon affirmative à une méconnaissance des règles de l’art dans le suivi de la patiente et à un retard de réaction du médecin traitant alors que M. B. ne disposait que des documents fournis par les ayants droit. Elle a donc estimé que le médecin-conseil avait produit un rapport tendancieux en méconnaissance des dispositions citées ci-dessus. Enfin, elle a signalé que les ayants droit de la patiente n'avaient pas expressément autorisé M. B. à communiquer à leur avocat son analyse du dossier médical. Une telle transmission, en l'absence de mandat à cette fin de la part d'une des personnes mentionnées à l’article L. 1110-4 du code de la santé publique, méconnaissait l'obligation de respecter le secret médical.
Le 18 juillet 2018, le Conseil d’Etat rejette le pourvoi formé par M. B. Il confirme ainsi le raisonnement de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins. Il rappelle ainsi que les obligations déontologiques des articles R. 4127-28 et R. 4127-56 du code de la santé publique s'imposent à tout médecin même pour celui qui est librement sollicité par un particulier en vue d'apporter son concours, par des analyses ou des conseils, dans le cadre d'un litige ou d'une expertise. M. B. ne pouvait donc pas produire une telle note en s’appuyant sur le peu d’éléments qu’il avait en sa possession. Il était également soumis au secret professionnel qu’il a violé en divulguant ces informations à l’avocat des ayants droit.
- Conseil d’Etat, 1ère et 4ème sous-sections réunies, 18 juillet 2018 (requête n° 406470 - ECLI:FR:CECHR:2018:406470.20180718) - https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000037220679&fastReqId=1926262049&fastPos=1- Code de la santé publique, article R. 4127-28 - https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006072665&idArticle=LEGIARTI000006912890&dateTexte=&categorieLien=cid - Code de la santé publique, article R. 4127-56 - https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006072665&idArticle=LEGIARTI000006912924 - Code de la santé publique, article L. 1110-4 - https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000020886954&cidTexte=LEGITEXT000006072665