Le fait qu'un patient ait des connaissances médicales ne dispense pas le praticien de remplir son obligation d'information mais est seulement susceptible d'influer sur la nature et les modalités de cette information. Si un acte médical a une visée esthétique, cette obligation est renforcée et doit porter sur les risques et inconvénients de toute nature pouvant en résulter.
Mme D. a saisi la chambre disciplinaire de première instance d'Aquitaine de l'ordre des médecins d’une plainte contre Mme A., à laquelle s'est associé le conseil départemental de Gironde. Par une décision, ladite chambre a infligé à Mme A. la sanction d'interdiction d'exercer la médecine pendant trois mois, dont un avec sursis. Mme A. a contesté cette décision.
Par une décision du 3 avril 2015, la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a annulé l'article 2 de la décision litigieuse, rejeté la plainte de Mme D. et du conseil départemental de Gironde de l'ordre des médecins. Elle retient que, puisque Mme D. était, en sa qualité d'assistante médicale de Mme A., réputée connaître toutes les caractéristiques de l'acte qu'elle lui avait demandé de pratiquer, cette circonstance dispensait Mme A. de toute obligation d'information préalable.
Dans un arrêt du 22 décembre 2017, le Conseil d’État a invalidé le raisonnement de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins. La Haute juridiction administrative rappelle que la circonstance qu'un patient détienne des connaissances médicales ne saurait dispenser le praticien de satisfaire à son obligation de l'informer, par un entretien individuel, de manière loyale, claire et appropriée, sur son état de santé et les soins qu'il lui propose, ainsi qu'il résulte des articles R. 4127-35 et L. 1111-2 du code de la santé publique. Elle précise qu'une telle circonstance est seulement susceptible d'influer sur la nature et les modalités de cette information. Elle en déduit qu’en statuant ainsi, la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a entaché sa décision d'une erreur de droit. Elle souligne que, s'agissant d'un acte à visée esthétique, l'obligation d'information est renforcée et doit porter sur les risques et inconvénients de toute nature susceptibles d'en résulter.
- Conseil d’Etat, 4ème et 5ème chambres réunies, 22 décembre 2017 (requête n° 390709 - ECLI:FR:CECHR:2017:390709.20171222), Conseil départemental de Gironde et Mme D. c/ Mme A. - https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000036253315&fastReqId=1592769212&fastPos=1
- Code de la santé publique, R. 4127-35 - https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=1476307797A5B3E54414E1857BF75529.tplgfr24s_3?idArticle=LEGIARTI000025843586&cidTexte=LEGITEXT000006072665&categorieLien=id&dateTexte=
- Code de la santé publique, article L. 1111-2 - https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006072665&idArticle=LEGIARTI000006685758&dateTexte=&categorieLien=cid