Une « grève sauvage » du personnel navigant suite à l’annonce surprise d’une restructuration ne constitue pas une « circonstance extraordinaire » permettant à la compagnie aérienne de se libérer de son obligation d’indemnisation.
Suite à l’annonce soudaine d’un plan de restructuration, par la direction d’une compagnie aérienne allemande à son personnel naviguant, ce dernier s’est placé en congé maladie. Si, en raison de cette « grève sauvage », de nombreux vols ont été annulés ou ont accusé un retard à l’arrivée de trois heures ou plus, la compagnie a estimé qu’il s’agissait de « circonstances extraordinaires » au sens du règlement de l’Union sur les droits des passagers aériens et a refusé de payer aux passagers affectés les indemnités qui y sont prévues.
Les juridictions allemandes, saisies d’actions en paiement de ces indemnités, ont demandé à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) si l’organisation par une partie importante du personnel navigant d’une « grève sauvage » relevait de la notion de « circonstances extraordinaires », libérant ainsi la compagnie aérienne de son obligation d’indemnisation.
Dans une décision du 17 avril 2018, la Cour répond négativement à la question posée. L’absence spontanée d’une partie importante du personnel naviguant, qui trouve son origine dans l’annonce surprise par un transporteur aérien d’une restructuration de l’entreprise, suite à l’appel relayé spontanément par les travailleurs eux-mêmes qui se sont placés en congé de maladie, ne relève pas de la notion de « circonstances extraordinaires ».A cet effet, la CJUE rappelle que selon le règlement précité, deux conditions cumulatives sont nécessaire pour retenir la qualification de « circonstances extraordinaires » d’un évènement. Celles-ci sont, d’une part, un évènement qui ne doit pas être, par sa nature ou son origine, inhérent à l’exercice normal de l’activité de la compagnie aérienne et, d’autre part, qui doit échapper à la maîtrise effective de celle-ci. En l’espèce, la Cour retient que ces deux conditions ne sont pas remplies puisque les restructurations et réorganisations font partie des mesures normales de gestion des entreprises et que la « grève sauvage » organisée ne peut être considérée comme échappant à la maîtrise effective de la compagnie aérienne car trouvant son origine dans une décision de cette dernière.
– Communiqué de presse n° 49/18 de la CJUE du 17 avril 2018 – « Une ‘grève sauvage’ du personnel navigant suite à l’annonce surprise d’une restructuration ne constitue pas une ‘circonstance extraordinaire’ permettant à la compagnie aérienne de se libérer de son obligation d’indemnisation en cas d’annulation ou de retard important de vol » – https://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2018-04/cp180049fr.pdf- CJUE, 3ème chambre, 17 avril 2018 (affaires jointes C-195/17,C-197/17 à C-203/17, C-226/17, C-228/17, C-254/17,C-274/17, C-275/17, C-278/17 à C-286/17, C-290/17 à C-292/17 – ECLI:EU:C:2018:258), Helga Krüsemann e.a./TUIfly GmbH – http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf;jsessionid=9ea7d2dc30ddf2e9be1e6d634fb2ae54fe2b33200dd1.e34KaxiLc3qMb40Rch0SaxyNbxz0?text=&docid=201149&pageIndex=0&doclang=fr&mode=req&dir=&occ=first&part=1&cid=324681- Règlement (CE) n° 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol, et abrogeant le règlement (CEE) n° 295/91 – Cliquer ici