La CEDH a condamné la France pour avoir collecté l’orientation sexuelle supposée d’hommes souhaitant donner leur sang et pour la durée excessive de conservation de ces données.Invoquant l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale), le requérant soutient que des données reflétant son orientation sexuelle supposée ont été collectées et conservées par l'Etablissement français du sang (EFS) dans des conditions contraires aux exigences de cet article de la Convention européenne des droits de l'Hommeeuropéenne des droits de l'Homme.
Dans un arrêt Drelon c/ France du 8 septembre 2022 (requêtes n° 3153/16 et 27758/18), la Cour européenne des droits de l'Homme juge qu'il y a eu violation de l’article 8 de la Convention EDH en raison de la collecte et de la conservation des données personnelles litigieuses.
La Cour considère que la collecte et la conservation de données personnelles sensibles constituent une ingérence dans le droit au respect de la vie privée du requérant.Elle juge que cette ingérence était fondée sur une base légale prévisible, le pouvoir d’appréciation laissé aux autorités concernant la création de fichier de santé étant, en la matière, suffisamment encadré par la loi du 6 janvier 1978 alors applicable.
Après avoir considéré que la collecte et la conservation de données personnelles relatives aux résultats des procédures de sélection des candidats au don du sang contribuent à garantir la sécurité transfusionnelle, elle précise que, pour autant, il est particulièrement important que les données sensibles concernées par ce traitement soient exactes, mises à jour, adéquates, pertinentes et non excessives par rapport aux finalités poursuivies, et que leur durée de conservation n’excède pas celle qui est nécessaire.
Or, la Cour relève en premier lieu qu'alors que le requérant avait refusé de répondre aux questions relatives à sa sexualité lors de l’entretien médical préalable au don, le traitement de données a été renseigné par la contre-indication au don propre aux hommes ayant eu un rapport sexuel avec un homme. Elle en déduit que les données collectées, fondées sur de simples spéculations, ne reposaient sur aucune base factuelle avérée.
En second lieu, après avoir relevé que le gouvernement ne démontrait pas que la durée de conservation des données litigieuses (jusqu'en 2278 à l’époque des faits litigieux) était encadrée de telle sorte qu’elle ne puisse pas excéder celle nécessaire aux finalités pour lesquelles elles avaient été collectées, la Cour juge que la durée excessive de conservation des données litigieuses a rendu possible leur utilisation répétée à l’encontre du requérant, entraînant son exclusion automatique du don de sang.