Le copreneur poursuivant l'exploitation a droit au renouvellement du bail rural comme son conjoint preneur en cas de départ de celui-ci, nonobstant toutes clauses, stipulations ou arrangements contraires.
En 1994, des époux bailleurs ont donné à bail à des époux preneurs diverses parcelles de terre pour neuf ans. Dix ans plus tard, ils ont consenti à l’épouse preneuse, dont le mari avait fait valoir ses droits à la retraite, un bail rural sur les mêmes terres, pour une durée de neuf ans. En 2010, l’épouse bailleresse, désormais seule usufruitière après le décès de son mari, a donné son accord à la cession du bail à la fille des preneurs. La nue-propriétaire s'y est alors opposée et a saisi le tribunal paritaire en annulation du bail et expulsion.
Le 29 novembre 2014, la cour d'appel de Rouen a fait droit à sa demande. Elle a retenu que l’acte de 2004, conclu par les bailleurs avec le conjoint resté en activité, ne s'analyse pas en un renouvellement en ce qu'il est distinct du précédent bail, auquel il ne renvoie pas. Elle a donc précisé qu'il constitue un nouveau bail nécessitant, pour sa validité, l'accord du nu-propriétaire qui n'y a pas concouru.
Le 9 juin 2016, la Cour de cassation a cassé l’arrêt rendu par la cour d’appel, au visa des articles L. 411-46 et L. 411-50 du code rural et de la pêche maritime. Elle a rappelé qu'il résulte de ces textes que le preneur a droit au renouvellement du bail, nonobstant toutes clauses, stipulations ou arrangements contraires. Elle a ajouté que ce droit est également reconnu au copreneur qui poursuit l'exploitation en cas de départ de son conjoint. Enfin, elle a conclu que le bail est renouvelé pour une durée de neuf ans à défaut de congé.En l’espèce, la Cour de cassation a décidé qu’en statuant ainsi, alors qu'en l'absence de congé mettant fin à la relation contractuelle, le conjoint copreneur qui poursuit seul l'exploitation a droit, nonobstant tout arrangement contraire, au renouvellement du bail rural par le seul effet de la loi, ce que l'acte de 2004 se bornait à mettre en œuvre, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
- Cour de cassation, 3ème chambre civile, 9 juin 2016 (pourvoi n° 15-12.772 - ECLI:FR:CCASS:2016:C300682) - cassation de cour d'appel de Rouen, 19 novembre 2014 (renvoi devant la cour d'appel de Caen) - https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032682804&fastReqId=1397105195&fastPos=1
- Code rural et de la pêche maritime, article L. 411-50 - https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006071367&idArticle=LEGIARTI000006583820
- Code rural et de la pêche maritime, article L. 411-46 - https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=70549E39563EFC3F11147BE21E299077.tpdila13v_1?idArticle=LEGIARTI000006583815&cidTexte=LEGITEXT000006071367&dateTexte=20160711&categorieLien=id&oldAction=