Aucune disposition ne subordonne le maintien de la contestation d’une créance, émise par le débiteur lors de la vérification des créances, à l’existence d’observations de sa part sur les réponses reçues des créanciers ou à la présence du débiteur au rendez-vous fixé par le liquidateur pour la signature de la liste des créances.
Une société a été mise en redressement puis liquidation judiciaires, respectivement en janvier et mars 2012. Le liquidateur a communiqué à son dirigeant la liste des créances déclarées et l’a convoqué pour en vérifier le bien-fondé. Le dirigeant s’est rendu à cette convocation et a remis au liquidateur un mémoire contenant des contestations relatives à certaines créances déclarées. Le liquidateur a avisé les créanciers des contestations et a transmis les réponses de ces derniers au dirigeant qu’il a convoqué par lettre recommandée avec demande d’avis de réception (RAR) pour signature de l’état des créances avant son dépôt au greffe. Le dirigeant ne s’étant pas présenté au rendez-vous fixé, le liquidateur a adressé la liste des créances au juge-commissaire, sans mentionner les contestations préalables du dirigeant. Le juge-commissaire a signé l’état des créances, qui a été déposé au greffe du tribunal le même jour. La société débitrice a relevé appel de l’ordonnance arrêtant l’état des créances.
Le 25 novembre 2014, la cour d’appel de Montpellier a déclaré irrecevable l’appel de la société.Après avoir relevé l’existence de contestations motivées et explicites pour deux créances, la cour d’appel a constaté que la société débitrice n’a pas donné suite aux réponses des créanciers à ses contestations, qui lui avaient été transmises par le liquidateur, qu’elle n’a pas retiré la convocation adressée, par lettre RAR, par le liquidateur, pour la signature de l’état des créances et ne s’est pas présentée au rendez-vous fixé à cette fin.Elle en a déduit qu’en l’état de son inertie et de son silence, la société débitrice ne peut soutenir que des différends persistaient avec les créanciers intimés et qu’ainsi, la société qui a été mise en mesure de participer à la vérification des créances, n’a élevé aucune contestation devant être soumise au juge-commissaire.
Le 2 novembre 2016, la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la cour d’appel, au visa de l’article L. 624-1 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 12 mars 2014, applicable en la cause, l’article L. 624-3 du code de commerce, textes rendus applicables à la liquidation judiciaire par l’article L. 641-14 du même code, les articles R. 624-2 et R. 624-4 de ce code, dans leur rédaction antérieure au décret du 30 juin 2014, applicable en la cause, rendus applicables à la liquidation judiciaire par l’article R. 641-28.Elle a indiqué que les contestations de créances déclarées, formulées au cours de leur vérification par le débiteur, doivent être mentionnées par le liquidateur sur la liste des créances qu’il remet au juge-commissaire, lequel ne peut statuer sur les créances contestées sans convocation préalable du débiteur. Elle a ajouté que ce dernier dispose d’un recours contre la décision du juge-commissaire statuant sur une créance qu’il a contestée et est fondé à se prévaloir du défaut de convocation devant le juge-commissaire pour faire annuler la décision ainsi rendue.En l’espèce, la Cour de cassation a estimé que la cour d’appel a violé les textes susvisés en statuant ainsi, alors qu’aucune disposition ne subordonne le maintien de la contestation d’une créance, émise par le débiteur au cours de la vérification des créances, à l’existence d’observations de sa part sur les réponses reçues des créanciers en application de l’article L. 622-27 du code de commerce, ou à la présence du débiteur au rendez-vous fixé par le liquidateur pour la signature de la liste des créances.
– Cour de cassation, chambre commerciale, 2 novembre 2016 (pourvoi n° 14-29.292 – ECLI:FR:CCASS:2016:CO00906) – cassation de cour d’appel de Montpellier, 25 novembre 2014 (renvoi devant la cour d’appel de Nîmes) – https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000033347250&fastReqId=1769836030&fastPos=1
– Code de commerce, article L. 622-27 – https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006236729&cidTexte=LEGITEXT000005634379
– Code de commerce, article L. 624-1 (applicable en l’espèce) – https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=F28EA7FF23FDE35749ABA3775DEFDD67.tpdila13v_2?idArticle=LEGIARTI000006236908&cidTexte=LEGITEXT000005634379&categorieLien=id&dateTexte=20140630
– Code de commerce, article L. 624-3 – https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000005634379&idArticle=LEGIARTI000006236923&dateTexte=&categorieLien=cid
– Code de commerce, article L. 641-14 – https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000005634379&idArticle=LEGIARTI000006238618&dateTexte=&categorieLien=cid
– Code de commerce, article R. 624-2 (applicable en l’espèce) – https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=02DED09520099A849ED5B235624D1A7C.tpdila19v_2?idArticle=LEGIARTI000006269456&cidTexte=LEGITEXT000005634379&categorieLien=id&dateTexte=20140701
– Code de commerce, article R. 624-4 (applicable en l’espèce) – https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=02DED09520099A849ED5B235624D1A7C.tpdila19v_2?idArticle=LEGIARTI000020250177&cidTexte=LEGITEXT000005634379&categorieLien=id&dateTexte=20140701
– Code de commerce, article R. 641-28 – https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006269681&cidTexte=LEGITEXT000005634379