Il y a dénégation du droit au statut des baux commerciaux lorsqu’une société locataire est immatriculée au RCS au titre d’une activité qui n’est pas celle réellement exercée dans les lieux loués.
En réponse à une demande de renouvellement du bail notifiée par une société locataire en juillet 2010, le bailleur a signifié, en septembre 2010, un refus de renouvellement avec offre d’une indemnité d’éviction. Après sommation visant la clause résolutoire délivrée, en décembre 2010, le bailleur a assigné la locataire en acquisition de la clause résolutoire, subsidiairement, en résiliation du bail à ses torts et, en tout état de cause, en déchéance du droit à une indemnité d’éviction, au regard du défaut d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés (RCS) pour l’activité réellement exercée dans les lieux.
Le 25 mars 2015, la cour d’appel de Paris a rejeté la demande de déchéance du droit à une indemnité d’éviction, retenant que, pour bénéficier du droit au renouvellement du bail et du paiement de l’indemnité d’éviction, la condition d’immatriculation au RCS du locataire doit s’apprécier à la date de la demande de renouvellement du bail, soit au mois de juillet 2010.Elle a également estimé que la société locataire a toujours été immatriculée au RCS pour les activités de vente d’objets d’art, bois sculptés, miniatures et ivoires, d’importation et d’exportation d’objets de luxe et que l’activité figurant à l’extrait K bis aurait dû être modifiée à la suite de la modification de son activité.Enfin, elle a retenu que l’absence de modification de l’immatriculation ne peut pour autant pas constituer un manquement suffisamment grave justifiant la déchéance du droit au paiement de l’indemnité d’éviction alors que le bailleur n’a jamais mis en demeure son locataire de régulariser la situation et que la loi ne prévoit expressément que l’obligation d’immatriculation.
Le 22 septembre 2016, la Cour de cassation a cassé l’arrêt rendu par la cour d’appel, au visa des articles L. 145-1-I, L. 145-8 et L. 147-17-I du code de commerce.Elle a indiqué que le droit au renouvellement ne peut être invoqué que par le propriétaire du fonds qui est exploité dans les lieux. Elle a ajouté que les dispositions portant statut des baux commerciaux s’appliquent aux baux des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds est exploité, que ce fonds appartienne, soit à un commerçant, soit à un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés accomplissant ou non des actes de commerce.En l’espèce, la Cour de cassation a estimé qu’en statuant ainsi, alors que la dénégation du droit au statut des baux commerciaux en raison du défaut d’immatriculation n’a pas à être précédée d’une mise en demeure et alors qu’elle avait constaté que la société locataire était immatriculée au RCS au titre d’une activité qui n’était pas celle réellement exercée dans les lieux loués, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé les textes susvisés.
– Cour de cassation, 3ème chambre civile, 22 septembre 2016 (pourvoi n° 15-18.456 – ECLI:FR:CCASS:2016:C300988), M. X. c/ société La Tentation du Mandarin – cassation partielle de cour d’appel de Paris, 25 mars 2015 (renvoi devant la cour d’appel de Paris, autrement composée) – https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000033145072&fastReqId=440770130&fastPos=1
– Code de commerce, article L. 145-1 – https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=F6082F3AB3A8550723C7E3184B9E5C70.tpdila17v_1?idArticle=LEGIARTI000019289948&cidTexte=LEGITEXT000005634379&dateTexte=20161007&categorieLien=id&oldAction=
– Code de commerce, article L. 145-8 – https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000005634379&idArticle=LEGIARTI000006221628&dateTexte&categorieLien=cid
– Code de commerce, article L. 147-17 – https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=F6082F3AB3A8550723C7E3184B9E5C70.tpdila17v_1?idArticle=LEGIARTI000006221800&cidTexte=LEGITEXT000005634379&dateTexte=20161007