Lorsqu’une mesure d’instruction est ordonnée sur requête, le défendeur potentiel à l’action au fond envisagée est nécessairement une personne intéressée au sens de l’article 496 du code de procédure civile, même si cette ordonnance ne lui est pas opposée au sens de l’article 495 du même code.
Alléguant des actes de concurrence déloyale et de parasitisme qu’elle imputait à deux sociétés d’un groupe, ainsi qu’à deux anciens salariés embauchés au sein de ce groupe, une société a obtenu par ordonnance sur requête, sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, la désignation d’un huissier de justice pour rechercher dans les locaux de l’une des entreprises concurrentes tous document de nature à établir l’existence de relations contractuelles avec certains clients. Celle-ci a interjeté appel de l’ordonnance ayant rejeté la demande de rétractation de l’ordonnance sur requête. Sur le pourvoi de la société alléguant les actes de concurrence déloyale et de parasitisme, la Cour de cassation a partiellement cassé l’arrêt de la cour d’appel ayant infirmé l’ordonnance entreprise. Les deux sociétés du groupe, ainsi que les salariés, sont intervenus volontairement devant la cour d’appel de renvoi.
Le 26 mars 2015, la cour d’appel de Douai a déclaré irrecevables les interventions volontaires des deux sociétés du groupe et des deux salariés. Elle a retenu qu’ils n’auraient pas été recevables à agir en rétractation devant le premier juge, dès lors, d’une part, que la mesure ordonnée ne prévoyait pas d’investigations susceptibles de se dérouler au siège social ou dans les locaux de la société et qu’aucune investigation n’y a été menée et, d’autre part, que le constat ne cite pas nommément les deux salariés, que leur présence dans les locaux de la société s’expliquait par les clauses de leurs contrats de travail et qu’ils n’avaient pas opposé à l’huissier de justice que les ordinateurs étaient des ordinateurs personnels alors qu’ils travaillaient pour la société et dans ces locaux.
Le 1er septembre 2016, la Cour de cassation a cassé l’arrêt rendu par la cour d’appel, au visa des articles 145, 329, 495 et 496 du code de procédure civile.Elle a rappelé qu’il résulte de la combinaison de ces textes que lorsqu’une mesure d’instruction est ordonnée sur requête, le défendeur potentiel à l’action au fond envisagée est nécessairement une personne intéressée au sens du quatrième des textes susvisés même si cette ordonnance ne lui est pas opposée au sens du troisième de ces textes.En l’espèce, elle a estimé qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher si les deux sociétés du groupe, ainsi que les salariés avaient la qualité de défendeurs potentiels à l’action au fond envisagée, ce qui leur aurait conféré un droit propre à intervenir à titre principal en cause d’appel, la cour d’appel a privé sa décision de base légale.
– Cour de cassation, 2ème chambre civile, 1er septembre 2016 (pourvoi n°15-19.799 – ECLI:FR:CCASS:2016:C201237) – cassation de cour d’appel de Douai, 26 mars 2015 (renvoi devant la cour d’appel de Paris) – https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/deuxieme_chambre_civile_570/1237_1er_34955.html
– Code de procédure civile, article 145 – https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006410268&cidTexte=LEGITEXT000006070716
– Code de procédure civile, article 329 – https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006070716&idArticle=LEGIARTI000006410486
– Code de procédure civile, articles 495 et 496 – https://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=2BFBE1D39F142593B6069528F904E1B3.tpdila07v_3?idSectionTA=LEGISCTA000006165206&cidTexte=LEGITEXT000006070716&dateTexte=20160907