Les préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux découlant d’une pathologie dépressive développée par le proche d’une personne à la suite du décès de cette dernière, dont il ne saurait être exclu par principe qu’ils puissent être en lien direct avec les faits à l’origine de ce décès, sont susceptibles de donner lieu à indemnisation.Le 14 novembre 2013, une mère a brutalement perdu son fils, alors âgé de 25 ans, à la suite d'un malaise. Dans les suites immédiates de ce décès, elle a développé un état anxio-dépressif d'intensité sévère.
Par un jugement du 13 novembre 2020, le tribunal administratif de Paris a retenu que des manquements fautifs, imputables aux conditions d'intervention du service d'aide médicale d'urgence (SAMU) de Paris ainsi que des sapeurs-pompiers, avaient été commis dans la prise en charge de la victime.Il a, par suite, condamné l'AP-HP, dont relève le SAMU de Paris, la Ville de Paris et l'Etat à verser à la requérante des sommes se montant au total à 20.000 € en tant qu'ayant-droit de son fils et à 38.083,50 € en ce qui concerne ses préjudices propres. Celle-ci a fait appel de ce jugement en tant seulement qu'il concernait l'indemnisation de ses préjudices propres.
Pour statuer sur l'indemnisation due à la requérante, la cour administrative d'appel de Paris a jugé le 16 mai 2023 (n° 21PA00218) que les préjudices résultant, pour elle, du décès de son fils devaient être indemnisés uniquement au titre de son préjudice d'affection, par le versement d'une somme forfaitaire majorée pour inclure, outre la douleur morale liée au décès de son fils, le retentissement pathologique avéré, notamment dépressif, qu'elle a subi, eu égard aux circonstances particulièrement traumatisantes du décès de son fils en sa présence et à son domicile, mais qu'en revanche, les préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux découlant de sa pathologie dépressive étaient insusceptibles de donner lieu à indemnisation, en l'absence de lien direct avec les fautes commises.
Dans un arrêt du 7 novembre 2024 (requête n° 475952), le Conseil d'Etat considère qu'en excluant ainsi par principe que les préjudices résultant de l'atteinte à l'intégrité psychique consécutive au décès d'un proche puissent être en lien direct avec les faits à l'origine de ce décès, la CAA commis une erreur de droit. La requérante est, dès lors, fondée à demander l'annulation de cet arrêt, en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions indemnitaires.
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