La Commission d’examen des pratiques commerciales se prononce sur la clause d’un contrat de commission, dans le secteur pharmaceutique, relative à l'indemnité du commissionnaire pour non-renouvellement du contrat.
La Commission d’examen des pratiques commerciales (CEPC) a été saisie des questions suivantes concernant un laboratoire pharmaceutique qui a conclu avec un distributeur spécialisé dans la commercialisation de spécialités pharmaceutiques un contrat de commission à la vente pour plusieurs des produits qu’il fabrique.
La clause d’un contrat de commission à la vente imposant au seul commettant de payer à son commissionnaire, en cas de non-renouvellement du contrat, quel que soit l’auteur du non-renouvellement et quelle que soit la cause de ce non-renouvellement, une indemnité d’un montant équivalent à deux ans de chiffre d’affaires, correspondant de fait à l’intégralité de la rémunération qu’aurait perçue le commissionnaire dans l’hypothèse d’un renouvellement du contrat, peut-elle être considérée comme créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, au sens de l’article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ?
En cas de réponse positive à cette question, le refus du commissionnaire d’aménager l’exécution d’une telle clause d’indemnisation, en vue notamment d’atténuer les conséquences du non-renouvellement du contrat, peut-il être considéré comme constituant le fait de soumettre ou tenter de soumettre un partenaire à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, au sens de l’article L. 442-6, I, 2° du code de commerce ?
Qualification juridique du contrat
Dans son avis n° 19-8 du 18 avril 2019, publié le 6 mai 2019, la CEPC précise que dans le cas d’un contrat d’agence commerciale, la question de la licéité de la clause d’indemnité compensatrice par rapport aux dispositions de l’article L. 442-6, I, 2° du code de commerce, ne se pose pas car cette indemnité compensatrice du préjudice subi par l’agent est due en cas de cessation des relations commerciales avec le mandant.
En revanche, s’agissant d’un contrat de commission, il est permis de s’interroger sur la justification de l’insertion d’une clause d’indemnité compensatrice au bénéfice du commissionnaire, mais également sur sa licéité notamment au regard des dispositions de l’article L. 442-6, I, 2° du code de commerce, dès lors que l’insertion de cette clause, n’est pas justifiée par la nature de la convention, ni par la qualité du mandataire ou encore par la volonté du législateur de prévoir un statut juridique du commissionnaire plus protecteur.
Dans les faits d’espèce soumis à l’analyse de la CEPC, la société commettante, est spécialisée dans la commercialisation de spécialités pharmaceutiques, elle agit ainsi en son nom propre de sorte qu’elle est titulaire de sa clientèle. Par ailleurs, selon les termes du contrat conclu entre les parties, la société commissionnaire a pour mission d’assurer pour le compte du commettant la promotion, la distribution et la vente des produits auprès des clients, sans que le pouvoir de négocier les contrats de vente avec les clients ne soit expressément stipulé dans le contrat de commission. Il est donc permis de considérer, sous réserve de l’interprétation souveraine qu’en ferait le juge civil, que le contrat de commission ne peut bénéficier de la qualification de contrat d’agence commerciale mais de la qualification de commissionnaire.
Clause constitutive d’un déséquilibre significatif
Cette clause d’indemnité crée une asymétrie notable dans les droits et obligations entre les parties tant dans les conséquences financières d’un non-renouvellement nettement défavorables au commettant, mais également parce qu’elle est de nature à entraver l’exercice de sa liberté de mettre un terme à la relation commerciale, moyennant le respect d’un préavis conforme aux exigences de l’article L. 442‑6, I, 5° du code de commerce du fait de son caractère dissuasif, rendant ainsi le commettant captif de la relation commerciale qui le lie à son commissionnaire.Il reste que l’auteur allégué de la pratique litigieuse a la possibilité de rapporter la preuve d’un rééquilibrage à l’échelle de la relation contractuelle dans son ensemble.
Que faire en cas de refus du commissionnaire d’aménager l’exécution d’une clause d’indemnisation contraire au code de commerce ?
S’agissant du point de savoir si le refus du commissionnaire d’aménager l’exécution d’une telle clause d’indemnisation, en vue notamment d’atténuer les conséquences du non-renouvellement du contrat, peut contrevenir à l’article L. 442-6, I, 2° du code de commerce, il doit être démontré que l’auteur allégué de la pratique impose ou tente d’imposer à son partenaire commercial la clause litigieuse.
Tel pourrait être le cas lorsqu’un distributeur se borne à refuser d’accéder à la demande de son cocontractant de réaménager une stipulation contractuelle alors que cette dernière ne comporte aucune justification ou encore qu’elle génère une telle asymétrie dans les droits et obligations des parties en sorte qu’une seule partie au contrat met uniquement à la charge, et au détriment, de son partenaire commercial de lourdes obligations dont il est le seul à bénéficier des avantages induits.
- Avis n° 19-8 de la CEPC du 18 avril 2019 relatif à une demande d’avis d’un cabinet d’avocats portant sur la conformité à l’article L. 442-6-I 2° du code de commerce de stipulations figurant dans un contrat de commissionnaire à la vente dans le secteur pharmaceutique - https://www.economie.gouv.fr/cepc/avis-ndeg-19-8-relatif-a-demande-davis-dun-cabinet-davocats-portant-sur-conformite-a-larticle-l
- Code de commerce, article L. 442-6 - https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000038414237&cidTexte=LEGITEXT000005634379&dateTexte=20190521&fastPos=1&fastReqId=1779124952&oldAction=rechCodeArticle